« Le peuple syrien veut désespérément la paix »
Par
Tulsi Gabbard, élue démocrate à la Chambre des représentants des Etats-Unis, vétéran de la guerre d’Irak, de retour de Syrie.
Le 24 janvier
2017
Tandis
que Washington se préparait pour l’inauguration du Président Donald Trump, j’ai
consacré la semaine dernière à une mission d’enquête en Syrie et au Liban pour
voir et entendre directement le peuple syrien. Leurs vies ont été consumées par
une guerre horrible qui a tué des centaines de milliers de Syriens et a forcé
des millions à fuir leur patrie en quête de paix.
C’est
maintenant plus clair que jamais : cette guerre visant à un changement de
régime ne sert pas l’intérêt de l’Amérique, et n’est certainement pas dans l’intérêt
du peuple syrien.
Nous avons rencontré ces enfants dans un refuge à Alep, leurs familles
ayant fui la partie Est de la ville. La seule chose que ces enfants veulent, la
seule chose que tous ceux que j’ai rencontrés veulent, c’est la paix. Beaucoup
de ces enfants n’ont connu que la guerre. Leurs familles n’ont pas de souhait
plus cher que de rentrer chez eux, et de revenir à la vie qu’ils connaissaient
avant le début de la guerre visant à renverser le gouvernement. C’est tout ce
qu’ils veulent.
J’ai
voyagé à travers Damas et Alep, écoutant des Syriens de différentes parties du
pays. J’ai rencontré des familles déplacées de la partie orientale d’Alep, de
Raqqa, de Zabadani, de Lattaquié et de la périphérie de Damas. J’ai rencontré
des leaders de l’opposition syrienne qui ont mené des manifestations en 2011,
des veuves et des enfants d’hommes qui luttent pour le gouvernement et des
veuves de ceux qui luttent contre le gouvernement. J’ai rencontré le Président du
Liban nouvellement élu [Michel] Aoun et le Premier ministre [Rafik] Hariri, l’ambassadeur
américain au Liban Elizabeth Richard, le Président syrien Assad, le grand Mufti
Hassoun, l’archevêque Denys Antoine Chahda de l’Église catholique syrienne d’Alep,
des chefs religieux musulmans et chrétiens, des travailleurs humanitaires, des
intellectuels, des étudiants, des petits propriétaires, et plus encore.
Leur
message au peuple américain était puissant et cohérent : il n’y a aucune
différence entre les rebelles « modérés » et Al-Qaïda (al-Nusra) ou Daech
– ce sont tous les mêmes. Il s’agit d’une guerre entre des terroristes sous le
commandement de groupes comme Daech et Al-Qaïda et le gouvernement syrien. Ils appellent
instamment les États-Unis et d’autres pays à arrêter de soutenir ceux qui
détruisent la Syrie et son peuple.
J’ai
entendu ce message encore et encore de ceux qui ont souffert et ont survécu à
des horreurs inexprimables. Ils m’ont demandé de partager leur voix avec le
monde; des voix frustrées qui n’ont pas été entendues en raison de faux
rapports unilatéraux et biaisés faisant la promotion d’un récit qui soutient cette
guerre de changement de régime au détriment des vies syriennes.
J’ai
entendu des témoignages sur la façon dont les manifestations pacifiques contre
le gouvernement qui ont débuté en 2011 ont été rapidement prises en main par
des groupes de djihadistes wahhabites comme Al-Qaïda (al-Nusra) qui étaient
financés et soutenus par l’Arabie saoudite, la Turquie, le Qatar, les
États-Unis et d’autres. Ils ont exploité les manifestants pacifiques, occupé
leurs communautés, et tué et torturé les Syriens qui ne voulaient pas coopérer
avec eux dans leur lutte pour renverser le gouvernement.
J’ai
rencontré une fille musulmane de Zabadani qui a été enlevée, battue maintes
fois et violée en 2012, alors qu’elle n’avait que 14 ans, par les « groupes
rebelles » qui étaient en colère contre son père, un éleveur de moutons, qui
refusait de leur donner son argent. Elle a regardé avec horreur les hommes
masqués assassiner son père dans leur salon, vidant tous leurs chargeurs sur lui.
J’ai
rencontré un garçon qui a été kidnappé en marchant dans la rue pour acheter du
pain pour sa famille. Il a été torturé, soumis au waterboarding, électrocuté,
placé sur une croix et fouetté, tout ça parce qu’il refusait d’aider les « rebelles
» – il leur a dit qu’il voulait seulement aller à l’école. Voilà comment les « rebelles
» traitent le peuple syrien qui ne coopère pas avec eux ou dont la religion n’est
pas acceptable pour eux.
Bien
qu’opposés au gouvernement Assad, l’opposition politique a fermement affirmé son
rejet catégorique de l’utilisation de la violence pour amener des réformes. Ils
soutiennent que si les djihadistes wahhabites, alimentés par des gouvernements
étrangers, réussissent à renverser l’État syrien, cela détruirait la Syrie et
sa longue histoire d’une société séculaire et pluraliste où les peuples de
toutes les religions ont vécu pacifiquement côte à côte. Bien que cette
opposition politique continue à demander des réformes, ils sont catégoriques
sur le fait que tant que des gouvernements étrangers mèneront une guerre de
changement de régime par procuration contre la Syrie en utilisant des groupes
terroristes djihadistes, ils se tiendront aux côtés de l’Etat syrien en œuvrant
pacifiquement pour une Syrie plus forte pour tous les Syriens.
Au départ,
je n’avais pas l’intention de rencontrer Assad, mais quand j’en ai eu l’occasion,
j’ai pensé qu’il était important de la saisir. Je pense que nous devrions être
prêts à rencontrer n’importe qui s’il y a une chance que cela puisse aider à
mettre un terme à cette guerre qui cause tant de souffrances au peuple syrien.
J’ai rencontré ces femmes remarquabes de Barzi, dont beaucoup ont
des maris ou des membres de leur famille qui se battent avec al-Nusra /
al-Qaeda, ou avec l’armée syrienne. Quand ils viennent dans ce centre communal,
tout cela est laissé de côté tandis qu’ils passent du temps avec de nouveaux
amis, apprennent différentes compétences comme la couture, planifiant leur
avenir. Elles ne se connaissaient pas avant de venir à ce centre communal dont
la mission est d’autonomiser ces femmes, et maintenant ce sont des « sœurs »
partageant ensemble le rire et les larmes.
Je
retourne à Washington DC avec une résolution encore plus grande pour mettre fin
à notre guerre illégale pour renverser le gouvernement syrien. De l’Irak à la
Libye et maintenant en Syrie, les États-Unis ont mené des guerres de changement
de régime, entraînant chacune des souffrances inimaginables, des pertes de vie
dévastatrices et le renforcement de groupes comme al-Qaïda et Daech.
J’appelle
le Congrès et la nouvelle administration à répondre immédiatement aux griefs du
peuple syrien et à soutenir la loi sur l’arrêt du soutien aux terroristes. Nous
devons arrêter de soutenir directement et indirectement les terroristes – directement
en fournissant directement des armes, de l’entraînement et du soutien
logistique aux groupes rebelles affiliés à al-Qaïda et à Daech ; et
indirectement via l’Arabie Saoudite, les Etats du Golfe et la Turquie, qui, à
leur tour, soutiennent ces groupes terroristes. Nous devons mettre fin à notre
guerre visant à renverser le gouvernement syrien et concentrer notre attention pour
vaincre al-Qaïda et Daech.
Les
États-Unis doivent cesser de soutenir les terroristes qui détruisent la Syrie
et son peuple. Les États-Unis et les autres pays alimentant cette guerre
doivent cesser immédiatement. Nous devons permettre au peuple syrien d’essayer
de se remettre de cette terrible guerre.
Je
vous remercie,
Tulsi